Seul dans la maison depuis quelques minutes, la tension retombe.

Léa, ma femme, est partie avec les enfants, Jean-Kevin et Augustin. Elle voulait aller rapidement au marché du dimanche matin sans les enfants. Ils déjeunaient en pyjama lorsque j'ai rappelé à Léa que j'étais disponible pour les pompiers. Je ne peux donc pas rester seul avec les enfants. Augustin n'a que deux ans. Il est trop petit pour rester seul s'il s'avère que je doive partir. Terminer de déjeuner, s'habiller… Il est 11h quand les enfants sont enfin prêts pour accompagner leur maman au marché. Léa est énervée de partir si tard. Les enfants n'ont pas envie d'y aller. Et moi, je sens bien que j'aurais dû me mettre indisponible mais je sais que le Dimanche matin nous ne sommes pas très nombreux. Et puis, ça fait longtemps que l'on n'a plus été au feu avec l'équipe. Bref, on s'est engueulé.

En buvant mon café, je regarde par la fenêtre. Tiens, au loin j'aperçois une colonne de fumée. Heureux hasard de l'histoire. Ça doit être à hauteur de Beauvillage. Je pose mon café, enfile mes chaussures… mon bip va sonner.

Rien.

Jadis pour un feu, toute l'équipe était bipée. Depuis que l'ordinateur choisit, il est possible que je ne sois pas sélectionné par le programme. C'est bizarre quand même car le camion devrait passer devant la maison et je n'entends pas les sirènes.

Depuis que le dispatching est devenu zonal, il n'y a plus quelqu'un que je pourrais appeler à la caserne pour avoir des nouvelles.

Prêt. Disponible. J'attends.

Dix minutes maintenant, je n'y tiens plus, je vais voir. Sur place, je vois l'autopompe et la citerne d'un corps voisin et la maison bien en feu. Notre autoéchelle est sur place avec 3 collègues. Ils me disent que nous n'étions que 5 pompiers dispos. Il faut 6 pompiers pour un premier départ. Quand c'était un humain qui bippait les hommes, nous serions partis à 5 et nous aurions limité les dégâts sur place au mieux. L'ordinateur s'en fiche, il veut 6 hommes.

J'étais disponible et je n'ai pas été bippé.
Léa et moi nous sommes engueulés pour rien ce matin.
On cherche des volontaires qui disaient et c'est très démotivant.
Putain d'algorithme…


Cette histoire est une fiction qui tente de raconter la difficulté pour les pompiers volontaires de rester motivés. Crédit photo chez DeviantArt par Elizabeth