Si je m'endors, me réveillerez-vous ?
Il fait si froid dehors, le ressentez-vous ?
Il fut un temps où j'étais comme vous
Malgré toutes mes galères, je reste un homme debout

Extrait de Un homme debout de Claudio Capéo (Clip officiel)

1995, levé, prêt, je prends la voiture pour me rendre à la gare. La campagne est calme. Nous sommes un peu plus de 4 milliards, le trafic est fluide, les trottoirs sont encore déserts. Je prends le train. À la sortie de la gare, quelques sdf papotent en buvant de la bière. Probablement que l'alcool réchauffe ou tout au moins permet d'oublier.

Je passe mon chemin.

J'ai un ami avec peu de revenus qui habite dans une petite maison mise à disposition par le cpas. Son papa est parti et sa mère est au chômage. Pour arrondir un peu les fins de mois, elle fait quelques ménages à droite à gauche. Ils s'en sortent.

Allocations de chômage, cpas… La sécurité sociale me rassure et me donne bonne conscience. J'allonge le pas, le travail m'attend.

2015, levé, prêt, je monte dans le bus pour me rendre à la gare. Il y a déjà du trafic et les voitures se suivent de près en passant devant la maison. Nous sommes 7,5 milliards. Sept milliards et demi ! À la sortie de la gare, les sdf habituels sont là. Ils ne sont pas spécialement plus nombreux. C'est sur le chemin du travail que l'on rencontre des gens avec leur petit gobelet. Ils ne sont pas rongés par l'alcool, ils sont jeunes, ils ne sont pas dans la rue depuis longtemps.

Je donne une tune.

Si je peux dépenser des euros pour un sandwich ou pour une bière, je peux dépenser quelques dizaines de cents pour que certains mangent un peu. La sécurité sociale ne me rassure plus. On est trop nombreux. Il faut se réhumaniser.


Crédit photo. La photo est issue du documentaire Salauds de pauvres.
Cette article est du même tonneau que l'article Faire la manche posté l'an dernier à la même période. Désolé si j'insiste.